Benkirane entre réveillon politique et gueule de bois économique

Publié le par Karim El Maghribi

 

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Plusieurs lectures d’une petite phrase prononcée tout fraîchement par le chef de la coalition au pouvoir : L’islamiste light (pas au sens lampant du terme) Abdelilah Benkirane qui haranguait dimanche ses co-militants dans le cadre d’une réunion de la section du PJD à Kénitra, en prévision  de la réunion de son conseil national, prévue les 29, 30 et 31 décembre (une première : le PJD invente le réveillon politique !). Le patron du PJD a déclaré lors de cette fête partisane à Kénitra, ville dirigée par son ami et ministre de l’Equipement et du Transport Abdelaziz Rabbah, que la promesse électorale d’un salaire minimum à 3.000 dirhams sera réalisée à la fin de l’actuelle législature. C’est-à-dire, sauf accident de parcours, vers l’été 2016 !

Pourquoi dans trois ans et pas maintenant ?  Réponses. Deux essentiellement.

1)     Prudence politicienne. Parce que Benkirane tient à la cohésion de sa coalition qu’il sait qu’elle ne tient qu’à un fil ténu. Une augmentation du Smig (salaire minimum garanti) mécontenterait en fait le RNI, proche du milieu des affaires, et le gouvernement volerait  alors en éclats et définitivement cette fois ;

2)     Joker de la politique de la terre brûlée. Si Benkirane sent, en fin de mandat, que ses chances de rempiler son minces ou compromises il voudra alors garder en main un petit joli cadeau qu’il léguera à ses éventuels successeurs. Autrement dit le parti qui sortira vainqueur en 2016 se retrouvera avec un fait accompli ou plutôt se retrouvera lesté d’un énorme boulet dont il ne saura quoi faire. Deux possibilités à ce moment là. Soit le nouveau chef du gouvernement reviendra sur le cadeau de Benkirane et signera sa perte, et du même coup le retour de ce dernier, soit il le maintient et ses jours seront comptés sur les doigts d’une main.

Maintenant voyons le cas où Benkirane décrètera le Smig  à trois mille balles tout en rempilant en 2016. Sans avoir besoin d’être un économiste chevronné,  ce salaire minimal ne sera d’aucun secours aux masses laborieuses dont les syndicats le réclamaient déjà depuis 10 ans. Avec une inflation qui risque de repartir en chevauchée à tout moment et le coût de la vie qui se renchérit à coup de taxes sans perdre de vue les effets désastreux et diaboliques de la décompensation en catimini, les 3.000 dirhams vaudront en 2016 le Smig d’il y a cinq ans, en 2008. Sinon moins.

Conclusion : la politique de Benkirane se résume en peu de choses. En le binôme carotte/déluge. « Vous voulez le paradis alors suivez-moi  jusqu’à la fin de mon mandat sinon ce sera l’enfer », semble prévenir Benkirane.Pathétique et mesquin.

 

Errata : on nous a écrit pour attirer notre attention sur la date du prochain Conseil national du PJD qui est du 28 au 30 décembre inclu et non pas comme l'a écrit du 29 au 31 décembre inclu. En tout cas ça ne change rien au fond de notre article d'autant que nombre de conclaves partisans ont l'habitude de jouer les prolongations.

Publié dans Analyse

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