Freiner le mouvement des printemps arabes derrière la frappe aérienne contre la Syrie ?

Publié le par Abdelkarim Chankou

Freiner le mouvement des printemps arabes derrière la frappe aérienne contre la Syrie ?
Les frappes aériennes menées par les États-Unis en partenariat actif avec la France et la Grande-Bretagne, qui ont lancé une centaine de missiles sur la Syrie dans la nuit de vendredi à samedi ressemblaient un peu à la révolution kadhafienne du 1er Septembre : elles étaient vertes à l’extérieur et rouges à l’intérieur. Autrement dit « humaines », pour la consommation du vulgum pecus ; dans ce sens qu’elles étaient une réponse adaptée à une attaque chimique présumée , menée par le régime d’Assad le 7 avril d’avant à Douma, jurent les trois alliés. Mais en réalité, ces frappes aériennes cachent des objectifs inavoués. C’est le côté rouge de la pastèque. Pour être direct, le véritable but de l’attaque était de sauver le régime de Bachar Assad et non pas de le fragiliser. Ce qui expliquerait la neutralité surprenante de Moscou dans cette affaire. Le trio Washington-Paris-Londres aurait tiré les leçons d’une de l’attaque tripartite menée l’Égypte de Nasser en 1956 par le trio Israël-France-Grande-Bretagne, connue connue sous le nom Opération Oméga . Voulant stopper l’élan réformateur du raïs égyptien qui pour sa révolution agraire avait nationalisé le canal de Suez le 26 juillet 1956 pour financer la construction du grand barrage, ces trois alliés ont poussé les Britanniques à envahir le pays des pyramides et Israël à pénétrer dans la péninsule du Sinaï (aujourd’hui repaire de terroristes de tous poils qui donnent des insomnies au président Al Sissi). Pour l’anecdote : N’étaient-ce la popularité du raïs Nasser et la forte pression politique du président des États-Unis Eisenhower et de son homologue soviétique Khrouchtchev, les forces armées de Grande-Bretagne, de France et d’Israël ne se seraient pas retirées complètement de l’Égypte le 22 décembre 1956. Khrouchtchev avait même menacé d’une guerre atomique ! Résultat de l’agression : Non seulement le raïs Nasser s’en était sorti indemne, mais beaucoup plus renforcé ! Le peuple déjà fasciné par son guide s’est davantage senti très proche de lui. Si cet échec patent des anciens agresseurs qui sert aujourd’hui de leçon aux nouveaux. En envoyant leurs ogives sur des cibles sans importance, quasiment des ruines selon des témoins, le trio franco-américano-britannique espérait faire d’une bière trois coups. Uno : donner l’impression que trois membres permanents du conseil de sécurité veillent au grain et se montrent intraitables sur l’usage d’armes prohibées. Deusio : liquider quelques stocks de missiles que c’est l’Arabie saoudite qui paye la facture. Tertio et c’est le but principal du show aussi illégal que placebo : ressouder le peuple autour de son leader Assad, à un moment où il a conquis plus des 2/3 de la Syrie après avoir mis totalement et Daech et la rébellion hors-jeu.
LES GRANDS MANITOUS DE LA MANETTE
La réponse qui vient à l’esprit est pourquoi donc ce revirement ? Pourquoi vouloir tendre la perche à homme honni il y a quelques semaines encore par la quasi-totalité du bloc occidental et son cortège de pays satellites ? La réponse peut paraître étonnante : stopper la vague des printemps arabes qui secouent et déstabilisent le monde arabe depuis la révolution du Jasmin qui a éclaté en Tunisie en décembre 2010. Ce mouvement contestataire qui jusqu’ici n’a fait que semer le chaos total en Libye, Syrie, Yémen, Égypte et le désordre au Maroc, Arabie saoudite, Algérie, Bahreïn Koweït etc., commence à inquiéter dans les grandes capitales occidentales qui font et défont les ordres mondiaux. En clair, le truc qui a coûté plus de 833 milliards de dollars aux pays arabes dont « 461 milliards de pertes en infrastructures détruites et en sites historiques dévastés » devient franchement contreproductif. Mais très productif pour les islamistes qui ont gagné énormément de terrain au Maghreb notamment. Pour certaines puissances le phénomène a débordé en contaminant des pays alliés via les réseaux sociaux et les télés satellitaires, pour d’autres il devient incontrôlable ou ne sied plus aux plans des catalyseurs du fait de changements de vision ou de pouvoir… Donc, signifier aux peuples arabes, surtout les jeunes, que l’Occident n’est pas vraiment leurs amis comme ils le croient, du moins plus leur sponsor pour changer les ordres établis… D’ailleurs, du Caire à Rabat en passant par Tunis et Alger, la contestation d’apparence sociale est d’essence politique ne cache même plus ses espoirs dans les forces extérieures pour lui venir en aide dans son entreprise déstabilisatrice. Reste à savoir à quoi ressemblera le nouveau désordre mondial que préparent aux petits peuples rêveurs les grands manitous de la manette. Une chose est sûre : les Etats-Unis et leurs alliés veulent en mettant fin au désordre et aux pertes de temps et d'énergie causés par des printemps arabes se consacrer au souci du moment : réduire l'influence de l'Iran à sa capacité d'avant la révolution en 1979.

Publié dans Analyse

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article